Interrogatoire du Lieutenant Thomas
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Interrogatoire du Lieutenant Thomas, Curt, 24 ans, né à Dresde
Toutes unités.- 2° bureau III° Armée N°2 / 179: Interrogatoire du Lieutenant observateur Thomas fait prisonnier le 6 aoù 1916 près de Moyenville:
Etat-Civil Thomas Curt, 24 ans, né à Dresde était Fähnrich au 179° Nommé lieutenant au début de la guerre, est blessé sous Lille en 1914 et évacué sur l’Allemagne. Entre ensuite dans l’école d’observateurs où il reste 2 mois. Est envoyé ensuite sur le front et attaché à une escadrille. A fait en tout une quarantaine de vols au-dessus de nos lignes. Actuellement attaché à la 23° escadrille, affectée elle-même comme escadrille d’Armée à l’Etat-Major de la 11° Armée allemande à St-Quentin Escadrille L’escadrille se compose de 6 appareils : 4 Rumpler C du modèle de celui que Tomas montait lors de sa capture et 2 Albatros, -de même force en chevaux (moteur Mercédès de 160 HP). Thomas déplore ce manque d’homogénéité dans la composition de son unité ; elle est due à la forte consommation d’appareils faite sur notre front. Observateur dans la région de Bapaume, depuis mai dernier, il se serait occupé tout spécialement de photos aériennes. Les 6 avions de son escadrille travaillent isolément sous la protection de Fokkers. Les appareils photographiques employés étaient des 9x12 modèle à crosse pistolet. Le front ennemi devant la 11° Armée allemande est divisé en secteurs. A chaque observateur est attribué un secteur une fois pour toute, toujours le même ; il ne s’occuperait pas des autres et ne photographierait que le sien exclusivement. Thomas prétend que chaque observateur arrive ainsi à connaître très vite et admirablement son secteur en ses moindres détails. L’exploitation et l‘interprétation des photos se faisait à l’escadrille. Une liaison très intime existerait entre : - les sections de repérage par lueurs : Einschneindetrupp, Einschneidekommando - et les escadrilles de photos aériennes. Les reconnaissances photographiques à grande distance se faisaient sous la protection de 2 appareils de chasse ou, à défaut, de 2 des RUMPLER de la 23° : Circonstances de la capture. Thomas était parti de St Quentin vers 10 heures le dimanche 6 août ayant pour mission d’escorter avec un autre Rumpler un 3° appareil de même type chargé de photographier tout le front français au sud de la Somme et dans la région de Noyon. Il n’emportait ni bombe, ni appareil de photo. En survolant la région de Compiègne, à environ 3.200 mèt d’altitude, il fut pris à partie par un tir violent et très bien ajusté de nos canons spéciaux : Le pilote, peu expérimenté, perdit la tête et se mit à faire des spirales au lieu de tenter de regagner les lignes allemandes ce qu’il aurait pu faire étant donné la hauteur considérable à laquelle il volait. Peu après, un Caudron bi-moteur survint et, survolant le Rumpler, le força à atterrir. Thomas prétend que sa mitrailleuse s’enraya à la 3° cartouche. Quant au pilote il ne pense pas même à faire usage de la sienne. Thomas affirme également que le moteur fonctionnait mal ceci, sans grande conviction d’ailleurs, afin d’excuser son pilote qu’il avoue être très novice et dénué de sang-froid : IL déclare en outre que l’autre Rumpler l’abandonna dès qu’il le vit attaqué par le Caudron. Appareil – Rumpler type C I numéroté 4593 / 15 moteur Mercédès 160 HP. Armement. 2 mitrailleuses : l’une à l’avant, horizontale et fixe, montée parallèlement au moteur, côté gauche, actionnée par le pilote à l’aide d’un Bowden ; l’autre à l’arrière, montée sur une genre de « Circulaire Couppet » actionnée par l’observateur. Munitions. Les bandes étaient garnies de trois genres de cartouches, soit des balles K nickelées) balles K cuivrées) à noyau d’acier balles L. E. explosives à temps Balles L.E. D’après les déclarations de Thomas ces balles, nommées Leuchtkugeln ou L.E. kuglen seraient destinées à permettre une correction efficace du tir. Elles ne seraient nullement explosives, mais destinées seulement à dégager, à un moment, un petit nuage de fumée qui permettrait de les situer en direction. Elles ne pourraient ni détoner, ni éclater à la percussion, au choc ou en passant à travers un corps dur ; elles fuseraient à un temps donné sensiblement le même pour toutes les balles : Elles n’auraient qu’une vitesse initiale assez faible et une portée très réduite : La balle laisserait échapper sa fumée sur un point de sa trajectoire distant de 100 à 150 mèt du canon de l’arme : Dans la pratique les tambours ou bandes de mitrailleuses sont garnies de ces cartouches L.E. toutes les 16 ou 20 cartouches K. En aucun cas la balle L. E. ne pourrait faire sauter un réservoir d’essence ou à hydrogène : elle ne serait nullement destinée à incendier les drachens contre lesquels elle est inopérante. De plus cette balle « ne serait pas une nouveauté ». Thomas affirme s’en être assez souvent servi depuis 2 mois environ. Le Rumpler Thomas vante la constance de son moteur et la stabilité de son appareil. Il reconnaît par contre que le Rumpler est lourd, peu maniable, monte mal et ne s’élève que très difficilement au-dessus de 3200 à 3800 mèt. L’atterrissage serait facile. Nouveau modèles. Thomas dit que les Allemand préparent en ce moment un appareil à grande vitesse pour la chasse. Il dépasserait de beaucoup la performance des fokkers et de nos Nieuport. Les bi-moteurs allemands auraient causé des désillusions et des accidents nombreux (chutes). Recrutement des pilotes. Serrait abondant, mais de qualité médiocre. Il avoue que l’Allemagne manque « d’as ». Il rend hommage au « cran » des aviateurs anglais et français. Bombardement de nuit. Thomas n’en a jamais fait ; il met en doute leur efficacité. Nous n’en faisons pas dit-il, parce que nous estimons que les résultats obtenus ne compensent pas les pertes ni en hommes ni en appareils. Offensive française sur la Somme. Thomas reconnaît que le commandement allemand, qui n’ignorait ni nos travaux, ni nos préparatifs en vue d’une offensive, fut surpris cependant non par l’attaque mais par la manière dont elle fut exécutée. Tadellos ! (parfaite), répète-t-il. Il avoue que l’on éprouve au Q.G.A. une sorte d’effarement en apprenant les résultats au début de notre action. Il se montre maintenant plein de confiance dans la solidité du front allemand : vous ne crèverez nulle part, affirme-t-il. Etat moral. Thomas, fils de très bonne famille, officier de carrière, vaniteux et distant, très entiché de son honneur de soldat et de sa qualité d’officier allemand, a un sourire supérieur lorsqu’on exprime devant lui des doutes sur la solidité inébranlables du front allemand. Il affecte une tranquillité, un calme souverain et une confiance absolue, tout en surface, qui s’effritent et tombent au cours d’une conversation d’assez longue durée. Après quelques hautaines réticences, il avoue que l’Allemagne peut être vaincue. S’il refuse à admettre qu’elle le sera militairement, il concède pourtant que la détresse économique la conduira à la ruine. Sa conviction, d’ailleurs, sonne faux, et les regards anxieux qu’il jette sur les communiqués français, publiant les victoires russes et italiennes en disent long. Il apparut atterré à l’annonce de la reprise de Gorizia. Il s’est résigné à la défaite autrichienne, mais affirme que le « sang allemand cimentera un solide mur nouveau qui endiguera le flot ruasse ». Il se laisse aller et livre les réflexions de ses camarades du mess : « on admet la défaite allemande ; n parle entre Officiers des conditions de la paix, de concessions fatales, des territoires qu’il faudra rendre. On n’espère plus qu’en une paix boiteuse (ein fauleur Friede). On rendrait les territoires occupés, la Lorraine, en échange des colonies, one ne réclamerait pas d’indemnité de guerre, on irait même jusqu’à en payer aux sinistrés. « Tant de sang allemand aura coulé, coulé pour rien à flots », dit Thomas. « Oui nous sommes loin de septembre 1914 alors que je menais mes hommes à l’assaut des pauvres défenses devant Lille ». « Notre peuple a été grand, mais il a subi une effroyable saignée. » Tout l’espoir de ses camarades et le sien paraît fondé sur un arrêt de notre offensive ou de celle des Russes. Il n’ose parler d’une Allemagne victorieuse et sa conclusion est : « L’Allemagne se retirera formidablement diminuée (furchtbar vermindet) de cette lutte ». Le moral semble donc en baisse réelle parmi les officiers de carrière allemands. Thomas ne considère guère ses camarades de la réserve qu’il traite de « civils » ou de « morveux » ; il les rend responsable des grosses pertes que quelques unités ont eu à subir en certains points. Cependant ses camarades et lui se raccrochent puérilement à certaines perspectives que leurs Chefs font miroiter devant leurs yeux. Ils escomptent un avenir de discorde dans le Camp de l’entente. Ils attendent je ne sais quelles dissensions entre les Anglais et nous. T prétend avec un fin sourire qu’on en sait long en Allemagne sr les noirs menées de notre allié britannique. « Vous verrez, dit-il en manière de conclusion, elle s’est installée à CALAIS, à BOULOGNE, et ne s’en ira jamais plus. Ce seront des Ports Anglais. Vous ne vous débarrasserez jamais de l’Angleterre qui est notre « ennemie commune ».
Document SHD AA
Examen de l'appareil.
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Interrogatoire d'un prisonnier
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