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Faure Eugène
Né le:
Mort le: 24 juin 1918
Profession avant la mobilisation:
Passé à l'aviation le:
Brevet militaire le:
Parcours:
Affectations:
Observateur


Faure 1 z

(Coll. P Guillermin)

Eugène Faure 24 juin 1918

Les deux frères ont montré la plus magnifique intrépidité, qui leur a valu les témoignages les plus flatteurs de leurs chefs;-citations, croix, médaille militaire.
Il est vrai que, lorsqu'on se hasardait à les en complimenter, ils répliquaient, chacun, avec une charmante modestie, et qu'on sentait si sincère
: « Mais je n'ai fait que mon devoir, je n'ai fait que ce que tout le monde fait. » Pour un peu, ils se seraient excusés et auraient été aussi étonnés de leurs décorations, que le doge de Gênes de se voir à Versailles sous Louis XIV. Le plus jeune est mort au service de la France..
Pour l'aîné, s'il est revenu vivant, ce n'est pas sa faute. . Le plus jeune, Eugène. Eugène Faure est resté cinq grandes années à Saint-Joseph (1901-1906). Venu en septième, à 9 .ans (il était né le -6 septembre 1892), il partit après quelques mois de seconde (année scolaire 1906-1907), Il partit par horreur du latin, lui qui devait se faire tuer si héroïquement pour la culture latine. C'est que la culture latine, ce n'est pas tant le latin, qu'un certain idéal de hauteur, de fierté, de beauté morale, de gentillesse et d'honneur, de chevalerie, que ne connaîtront jamais nos ennemis, barbouillés de philologie, d'algèbre et de chimie toxique. C'est pour cela qu'ils sont morts, si joliment, nos gentils enfants de France. Entre autres, Eugène Faure.
11 avait été continuer ses études dans le célèbre établissement des Frères de Passy, exilé à Froyennes en Belgique.
Déêsormais, mieux en goût d'étudier, avec des programmes plus conformes à ses voeux et à ses aptitudes, il aboutit aux meilleurs résultats. Les baccalauréats marchèrent bien.
Puis, ce fut la préparation à l'Ecole centrale. Il y fut reçu au concours de 1914.
Juste pour être sôus-lieutenant, ensuite lieutenant d'artillerie au 39°. Ce qu'il préférait, c'étaient les missions les plus périlleuses. Il fut servi à souhait comme agent de liaison.
C'est ainsi qu'il fut blessé assez sérieusement à la tête, d'un éclat d'obus, sur la route de Bras à Fleury, le 27 février 1916. Une première citation saluait sa bravoure
le 25 mars suivant : « Jeune officier plein de courage, agent de liaison près de l'infanterie ; a parcouru la première ligné au milieu d'un bombardement intense ; a envoyé des renseignements
qui ont permis un concours efficace de l'artillerie ; blessé d'un éclat d'obus à la tête. »
Mais, les. risques de l'agent de liaison, et surtout tirer de loin le canon ne lui suffisaient pas. Après bien des tentatives infructueuses, il finit par obtenir d'entrer dans l'aviation.
Il fut d'abord observateur à l'escadrille F. 35, plus  tard officier de renseignements à l'aéronautique du 20° corps. « Il trouvait toujours, remarque son professeur, n'en pas faire assez, s'indignait même.qu'on ne le laissât pas se dévouer tout entier, à plein coeur ; de là, son désir ardent d'être pilote, afin de se dévouer plus complètement pour son pays. » Le 3 avril 1918, il était encore glorieusement cité : « Observateur de premier ordre, qui collabore d'une façon constante avec le S. R. A. (Service renseignements aviation), rend à l'artillerie les meilleurs services par la précision des renseignements, exécute de fréquentes reconnaissances en avion pour situer l'artillerie ennemie. »
C'est dans une de ces dangereuses reconnaissances qu'il rencontra la mort, qu'on peut dire qu'il souhaitait ; car un jour il avait écrit : « Je ne souhaite pas une plus belle mort que celle de mes camarades. » Et une autre fois:
« J'aurais pu me faire évacuer; mais, je croyais qu'on était encore dans la fournaise ; alors, j'ai rejoint mon régiment. » Le 24 juin 1918, dans la matinée, il montait en instants après, ils mouraient tous les deux noblement pour la patrie. Le même messager porta aux deux familles si cruellement éprouvées la triste et glorieuse nouvelle.
Eugène Faure avait 25 ans. Mourant à. la fleur de l'âge, il était prêt, parce qù' « ils'était formé sous le bon Maître, s'était mûri au soleil du bon Dieu. » On l'a dit avec une juste et touchante finesse :.« Il est mort pour la France et en plein ciel. Est:il mort plus belle ? Pour cueillir ces âmes, il suffit au bon Dieu de se pencher un peu. » Et, tandis que Dieu se penchait, la France, elle, se dressait pour épingler sur sa poitrine, avec la croix de guerre, la croix d'honneur.
Belle mort, en vérité, pour celui qui avait vécu la guerre qu'il avait vécue. En témoignage émouvant, quelques extraits de sa correspondance. Juillet 1915 : « Nous sommes tous pleins d'espoir dans la fin des hostilités. Mais jusqu'ici rien n'indique la date, même approchée, de cette fin. Qu'importe ? Nous serons toujours confiants, .dussions-nous reprendre pied à pied notre territoire !... N'allez pas croire que, parce qu'il y a des permissionnaires, il est nécessaire que les membres de votre famille qui sont aux armées aient des permissions. Outre que ce. n'est qu'une faveur, je n'y ai aucun droit, n'étant pas dans les conditions requises. »
Septembre 1915 : « Les boches viennent de nous marmiter avec du 150. Mais, malgré le bruit assourdissant, la fumée épaisse et l'odeur acre de leurs obus, nous avons assisté, en spectateurs amusés, au tir de leurs contre-batteries, d'après le grand précepte qu'il vaut mieux être là où ils visent que là où ils tirent. » Et cet humour charmant continue : « Ce soir, nous changeons d'hôtel en plein air... En avant! » On sent le soldat pour qui « cette oisiveté est odieuse ! » Parlant des obsèques d'un camarade : « Il y avait un inonde fou. Les civils très impressionnés. On voit qu'ils n'ont pas l'habitude. » Il envisage froidement l'éventualité de ses propres obsèques : « Il me vient une idée que je vais vous dire. Si j'étais descendu un jour, on vous avertirait télégraphiquement. Il ne faudrait pas oublier de 'payer le cercueil (260 fr. je crois), qui aurait été commandé par les soins de l'escadrille. » Oh ! le brave enfant ! Les funérailles d'Eugène Faure se déroulèrent au milieu d'un véritable triomphe. Avec son camarade Jean Marty, il fut au nombre des six premiers soldats de Périgueux ramenés des cimetières du front. Il fut donc enseveli dans les pompes magnifiques de cette inoubliable solennité du . 19 mars 1921, fête de saint Joseph, en présence de toutes les autorités
religieuses, militaires et civiles, avec le concours de toutes les sociétés, de toutes les écoles de la ville, des deux régiments d'infanterie et d'artillerie, formant un interminable et émouvant cortège — parti de la gare pour aboutir.à la cathédrale — qui défila gravement, sous un soleil radieux, entre deux haies compactes d'un peuple en larmes. 11 nous sembla que, dans la personne de nos deux anciens, ces honneurs ncomparables étaient rendus à nos 127 héros de la grande guerre. Notre souvenir fidèle et reconnaissant les y avait appelés. Ils y étaient tous présents dans notre amour.

Collège Saint Joseph, Périgueux. Livre d'or


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